La société par actions (ci-après s.p.a.) est le choix de prédilection pour un grand nombre d’entrepreneurs cherchant à faire affaire au Québec et au Canada en général. En effet, s’agissant d’une personne morale ayant sa propre personnalité juridique et donc directement titulaire de droits, la s.p.a. est distincte de ses membres et n’engage généralement que sa propre responsabilité.
Bien que la s.p.a. soit reconnue en tant que « personne morale » par la loi québécoise sur les sociétés par actions, la Loi sur les sociétés par actions (ci-après « LSAQ »), et ait conséquemment des droits et des obligations juridiques, elle demeure une entité immatérielle. On peut donc se poser la question : comment est-ce qu’une s.p.a. choisit la direction vers laquelle elle évolue, comment prend-elle les décisions affectant son existence ? Cela nous mène à examiner le rôle du conseil d’administration («ci-après « CA ») de la s.p.a. québécoise, ainsi que ses tâches et responsabilités. Cet article a pour but d’éclairer le lecteur sur les rouages internes d’une s.p.a. au Québec en ce qui concerne le CA, compréhension qui est importante quand l’on considère se lancer en affaires dans la Belle province.
Qu’est-ce qu’un conseil d’administration d’une société par actions ?
D’un point de vue général, le CA est l’organe de la s.p.a. qui a vocation à gérer les grandes orientations de l’organisation ainsi que ses activités et affaires internes, tout en surveillant sa gestion, sauf si ses pouvoirs ont été restreints ou retirés par une convention unanime des actionnaires 1 . Soulignons que ces pouvoirs appartiennent au CA en tant qu’organe de la s.p.a., et non à chaque administrateur pris individuellement et que l’exercice des droits du CA ne nécessite généralement pas l’approbation des actionnaires de la s.p.a.
Bien que le CA ait le droit de déléguer certains de ses pouvoirs, nombre de ses mandats ne peuvent être confiés à une tierce personne. Par exemple, seul le CA peut soumettre aux actionnaires des questions qui nécessitent leur approbation, combler les postes vacants des administrateurs ou du vérificateur ou de nommer des administrateurs supplémentaires, autoriser l’émission d’actions, etc 2 .
De plus, le CA administre les affaires de la s.p.a. en passant en son nom tout contrat qui est permis par la loi, et prend également le règlement intérieur après la création de la s.p.a. Cela est important, puisqu’il s’agit de l’ensemble de règles régissent les opérations internes de la société et encadrant les interactions de ses membres.
Mais qu’est-ce qu’exactement un administrateur ?
Toute personne physique est habilitée à agir en tant qu’ administrateur d’une s.p.a. au Québec, sauf les mineurs, les majeurs en tutelle ou curatelle, les failli ou les personnes à qui le tribunal a interdit l’exercice de cette fonction 3 . Contrairement à la loi canadienne sur les sociétés par actions qui édicte que le CA doit être composé, en tout temps, d’au moins 25% de résidents canadiens 4 , la loi québécoise ne prévoit aucune limitation à ce niveau, offrant donc une flexibilité attrayante pour les entrepreneurs étrangers.
Les premiers administrateurs d’une s.p.a. seront ceux qui figurent sur la liste des administrateurs que les fondateurs de la s.p.a. envoient au Registraire des entreprises du Québec (REQ) en même temps que les statuts de constitution, et peuvent être des personnes différentes des fondateurs 5 . Elles entreront en fonction à la date figurant sur le certificat de constitution 6 , et demeureront en poste jusqu’à la première assemblée des actionnaires, où les premiers administrateurs élus seront choisis par les actionnaires.
L’administrateur est un mandataire de la s.p.a. et doit ainsi, dans l’exercice de ses fonctions, « respecter les obligations que la loi, l’acte constitutif [de la s.p.a.] et les règlements [de la s.p.a.] lui imposent et agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés 7 ». L’administrateur exercera aussi ses pouvoirs de façon à assurer que la s.p.a. elle-même agisse en conformité à la loi. Ainsi, il s’agit d’un rôle important comportant des obligations étendues.
L’administrateur doit également agir avec prudence et diligence, ainsi qu’avec honnêteté et loyauté dans l’intérêt de la personne morale 8 . Il est primordial de comprendre cela, puisque de ce principe découle l’obligation qu’a tout administrateur d’éviter de se placer dans une situation de conflit entre son intérêt personnel et ses obligations d’administrateur 9 . Certains actes ou omissions peuvent engager la responsabilité personnelle de l’administrateur, telle la déclaration illégale d’un dividende (c.-à-d., la part des bénéfices de la société qui est attribuée à chaque actionnaire),
Cependant, soyez rassuré(e) : les tribunaux québécois et canadiens considèrent généralement que les administrateurs ne seront pas tenus responsables des erreurs de jugement; en effet, il faudrait pour cela qu’il s’agisse d’une faute lourde ou grossière.
Il faut aussi garder en tête qu’opérer une société par actions est un processus en continu et que maintes obligations doivent être respectées tout au long de l’existence de la s.p.a. québécoise.
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1 Loi sur les sociétés par actions du Québec, art. 112; La convention unanime des actionnaires (ci-après « CUA ») est une entente particulière concernant les activités et les pouvoirs des administrateurs que les actionnaires peuvent conclure entre eux. Cela leur permet de retirer des pouvoirs des administrateurs afin de les exercer eux-mêmes. La CUA doit être signée par tous les actionnaires et doit être publiée au REQ. Il y aura également l’obligation d’inscrire les noms et adresses des actionnaires qui exercent les pouvoirs à la des administrateurs.
2 LSAQ, art. 118.place
3 C.c.Q., art. 327.
4 Loi canadienne sur les sociétés par actions (ci-après « LCSA »), art. 105 (3).
5 LSAQ, art. 8 (1), 107.
6 LSAQ, art. 107.
7 Code civil du Québec (ci-après « C.c.Q. »), art. 321, 2138.
8 C.c.Q., art. 322.
9 C.c.Q., art. 324.
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Cet article a été rédigé avec la collaboration d’Irina Gueorguiev